Quand Jean Orieux nous fait dĂŠcouvrir La Fontaine, c'est en vĂŠritable ami qu'il le prĂŠsente, c'est-à-dire sans indulgence mais sans sĂŠvĂŠritĂŠ, avec une tendresse toujours chaleureuse. Il essaie - et il y parvient de façon magistrale - de nous entraĂŽner dans les arcanes de ce tempĂŠrament : tâche difficile car La Fontaine est un être secret, qui ne dĂŠvoile qu'à contrecoeur ses sentiments. Et c'est par une lecture entièrement nouvelle des Fables et des Contes que Jean Orieux ĂŠclaire comme jamais elle ne le fut cette personnalitĂŠ dont il nous dit : " La Fontaine ĂŠchappe à tous les jugements et s'ĂŠvade de toutes les catĂŠgories. Le voici en disciple d'Epicure ; si l'on tourne la page, il est jansĂŠniste. Il est paresseux et s'en flatte ; penchons-nous sur les manuscrits qu'on a de lui : c'est un travail de bĂŠnĂŠdictin, Il raille les prêtres, le pape, adore la voluptĂŠ ; or, il n'a jamais cessĂŠ d'être profondĂŠment religieux. TantĂ´t il flatte le roi pour ses conquêtes et le pousse à conquĂŠrir encore ; tantĂ´t il exècre les conquĂŠrants et, en mainte occasion, fait l'ĂŠloge de la paix. Il chante la solitude et la simplicitĂŠ rustiques, mais il se complaĂŽt dans les salons des duchesses. Il fait sa cour aux femmes les plus ĂŠlĂŠgantes dans des poèmes d'une dĂŠlicatesse inimitable, mais il aime fidèlement les gaillardises d'auberge et de bordel. Une douce gaietĂŠ baigne son oeuvre ; or, il est la proie d'une mĂŠlancolie profonde. Il faut en prendre son parti : La Fontaine est tout cela. "